L'histoire du savon


L'Antiquité

Selon les historiens, le savon est apparu il y a plus de 4500 ans. Il n'était bien sûr pas composé avec les mêmes produits qu'aujourd'hui. En effet, les Sumériens, un  peuple de Mésopotamie, le fabriquaient sous forme de pâte à base de graisse animale et de carbonate de potassium, tout comme les Égyptiens, qui y font allusion dans certains papyrus. En revanche, il ne servait pas à la toilette quotidienne mais pour se blanchir les cheveux, ou contre les maladies de peaux. Au temps de l'Égypte ancienne, on se frottait le corps avec du bicarbonate de soude à l'état naturel, appelé “natron“, mélangé une pâte de cendres et d'argile.

En 2000 avant Jésus-Christ, les Sumériens fabriquaient déjà une pâte faite d'huile, d'argile et de cendres qui ressemblait à un savon mou. Mais ce n'est qu'à partir du IIème siècle après J.C. que les Romains l'utiliseront pour se laver. Les Arabes, quant à eux, le développeront en y ajoutant des cendres de plantes maritimes contenant de la soude. Au IVème siècle, on retrouve une pâte de cendres et de graisse animale sous le nom de "sapo" d'origine gallo-romaine.


Au Moyen-âge

Au VIIème siècle, les recettes de fabrications se sont diversifiées et d'autres applications apparaissent, telle que la lessive à base de chaux cuite. C'est à cette même période que la fabrication s'exporte dans la région méditerranéenne, et surtout en France, dans la cité phocéenne de Marseille qui va devenir le principal port de transit du savon.

Au XIIème siècle, les Égyptiens, les Tunisiens et les Perses faisaient commerce du savon, qui restait un produit fort coûteux et confidentiel, l'hygiène n'étant pas la préoccupation première au Moyen-âge. On apprend que la graisse animale employée était le suif de chèvre et que les cendres étaient issues du hêtre et du varech.

Ce n'est qu'au XIIIème siècle que le savon subit une révolution, la graisse animale est remplacée par l'huile d'olive, ce qui rend le savon plus ferme. C'est le savon de Marseille. Le premier savonnier marseillais officiel apparaît en 1371 et s'appelle Crescas Davin.

A La Renaissance

A la Renaissance et durant trois à quatre siècles, le savon cède peu à peu la place au parfum, qui était censé protéger des maladies contagieuses comme la peste. L'eau du bain devait être transportée avec des seaux, puis chauffée, ce qui pouvait être parfois compliqué. C'est pourquoi l'on se contentait d'un ou deux bains par an. Le savon, alors, est généralement la résultante d'un alcali (sel extrait de cendres ), mélangé à un corps gras.

Au XVème siècle, les premières savonneries industrielles marseillaises exportent leur production, imitant le savon d'Alicante, puis embauchent du personnel qualifié dans toute la Méditerranée, ce qui leur permettra de perfectionner leurs techniques et d'exporter davantage.

Au XVIIème siècle, la consommation de savon est en augmentation car son usage tend à se généraliser, pour le lavage du linge notamment. Fin XVIIème, Marseille exporte à travers le monde.


Le premier édit réglementant la profession date de 1688 et  interdit, entre autres, d'utiliser un autre corps gras que l'huile d'olive.

Au XVIII ème siècle

Au XVIIIème, on trouve deux sortes de savons pour des usages différents. Le savon blanc pour les soyeux, bonnetiers, filateurs, teinturiers, blanchisseurs et parfumeurs et le savon marbré pour le dégraissage des laines, les ménages et les colonies. La fabrication est alors la principale ressource de Marseille.

En 1783, un chimiste suédois du nom de Carl Scheele, obtient une substance à qui l'on donne, aujourd'hui, le nom de glycérine.


Le 1er et second Empire, jusqu'au XX ème siècle

En 1801, l'importation de matières premières pour le savon est bloquée par les Anglais. L'embargo fait augmenter le prix de l'huile d'olive et oblige les fabricants à utiliser l'huile de noix, de colza ou de lin. En 1810, chaque savonnier devait appliquer sa marque et garantir la qualité de son savon et une commission de contrôle veillait au bon respect de la confrérie. Les savonniers décident de se passer des négociants et l'on incorpore désormais 10 à 20% d'huile de palme et de coco dans la masse d'huile utilisée. C'est un autre chimiste d'origine française, Michel Chevreul, qui publie une théorie exacte de la saponification, et avec Gay-Lussac, fait breveter un procédé d'extraction des acides gras du suif donnant naissance à une nouvelle matière première, l'oléine.  J.D. Rougier, lui, invente un procédé qui blanchit l'huile de palme et permet d'obtenir un savon blanc.

Dès la seconde moitié du XIXème siècle, les usines ferment les unes après les autres car peu mécanisées. Les habitudes des consommateurs évoluent, la population consomme progressivement d'autres huiles que huile d'olive. On voit alors apparaître de nouvelles recettes de savon à l'huile de lin, de sésame, ou d'arachide, ce qui permet d’élargir la gamme proposée. Des notions d'hygiène élémentaire se répandent peu à peu en Europe et vers 1880 la tendance s'inverse avec des  manufactures capables de produire 12500 tonnes de savon par an.

Au XXème siècle, l'usage du savon est passé dans les mœurs bien que certaines études sur l'hygiène laissent à penser le contraire. Les savonneries fusionnent avec les huileries pour créer de nouveaux débouchés. Entre 1920 et 1930 la concurrence s'intensifie avec la survenue des détergents synthétiques aussi appelés agents tensioactifs.


De nos jours

Aujourd'hui, on retrouve ces agents dans les shampooings, les gels douches et les “savons sans savon“. Ces derniers se sont installés sur la croyance de l'effet déshydratant du savon alors qu'au contraire, les savons à la glycérine respectent parfaitement l'épiderme. A la fin du XXème siècle, et malgré l'usage intensif des poudres à laver, des gels de bain moussants et autres savons liquides, on sent renaître l'intérêt du public pour la bonne vieille savonnette :

Le consommateur souhaite utiliser des produits plus sains, plus naturels et de qualité, afin de préserver son capital santé. Il est aussi soucieux de la protection de l'environnement.

Aidé en cela par leur imagination, des savonniers à froid sortent des sentiers  battus pour nous proposer des savons de qualité, élaborés avec des matières premières végétales.